« Mon
pari c’est Paris ». Un Paris à tout prix pour Jean le
dissident au « bon bilan », ex ami de « Chichi »
et présenté comme l’héritier sinon l’Animateur d’un « système »
que son opposant du RPR souhaite rompre sans pour autant le
définir. Tibéri entouré de ses derniers fidèles à des allures
de mercenaire. Terminer coûte que coûte sa mission. Il se
livre à un drôle de jeu ; il menace le Président, le
désignant indirectement comme responsable du « système » ;
il peste contre un parti « aux méthodes d’un autre temps. »
Ce dernier vient de l’exclure. Et il n’est finalement pas
« souhaité », « envisagé » au seul débat
télévisé organisé autour de la campagne parisienne. Le délaissé,
le bouc émissaire en quête de crédibilité et de représentativité
ne s’inquiète pas du basculement historique de la ville à
gauche. Tibéri n’a pas d’adversaire. Il semble se battre contre
lui même. Son statut d’intérimaire ne lui sied pas. Le remplaçant
rêve d’être titularisé au terme de sa mission. Il aurait dû
expédier les affaires courantes . Le voilà au cœur des affaires,
de la polémique.
Sa
campagne est paradoxale. Elle est rythmée par les décision
de justice qui secoue la mairie de Paris et le cinquième arrondissement
en particulier, « son » fief parisien. Ce statut
de témoin assisté, qui le fait basculer entre témoin et mis
en examen ne le gêne guère. Il ne se présentera pas à la convocation
des juges. L’enquête n’est qu’un camouflet orchestré par Jacques
Toubon, le RPR et la gauche. « Le Saint » jeté aux
chiens payant pour d’autres moins scrupuleux, moins regard(és)ant
devient son thème de campagne. Le « paria » se débat,
encaisse les attaques et tâche d’esquiver les nouvelles. Il
essaie d’exister. Les attaques dont il fait l’objet lui donnent
finalement une consistante inespérée, inavouable. La « victime »
spécule sur l’effet « affaire ». L’ellipse, le non
dit, la périphrase baignent ses discours politiques. Le looser
aux allures de coq sportif se cherche une place. Et s’il ne
jouait que le cinquième et non la mairie ? Immunité
ou repentance ?
Tibéri
aurait mis en place une peu scrupuleuse pompe à faux électeurs.
L’enquête en cours a déjà révélé l’existence de 3315 vrais-faux
votants inscrits de manière irrégulière. Il est donc suspecté
et dénoncé d’avoir activement participer à l’inscription d’électeurs
fictifs dans le cinquième. Comble de malchance, ils voteraient
en sa faveur. En 1997, Jean Tibéri remporte les législatives
avec 2275 voix d’avance.
Mai
2001. Jean Tibéri a été reconduit à la mairie. Son « cinquième »
incarne l’esprit rive gauche et flirte avec le quartier latin.
Station de métro Cardinal Lemoine. A droite le Panthéon, à
gauche la rue Mouffetard. Quelques gouttes d’eau glacées s’infiltrent
dans la bouche métro et se déposent sur les vitres du guichet
RATP. La préposée est avenante. Le quartier touristique. Elle
consent instantanément à consulter son plan d’arrondissement.
Première impasse. Le 373 de la rue Saint Jacques ne figure
pas dans l’index. Nouvelle adresse fantôme ; le 139 bis
rue Mouffetard n’est pas répertorié. Geste d’exaspération
de la guichetière. Regard soupçonneux. Et soulagement non
feint lorsque elle localisera les deux prochaines destination.
Les deux adresses fantômes ne sont plus qu’à ranger au rayon
« touriste mal informé ».
Au
dehors les élections ne sont plus qu’un souvenir évoqué par
des affiches décrépis. Les bars de la rue Mouffetard ferment
à une heure du matin. Les tenanciers s’en plaignent souvent
et désignent un haut fonctionnaire qui rejoint son appartement.
Dans une rue Mouffetard baigné par le soleil, les épiciers,
pâtissiers ou autres vendeurs à la criée sont trop occupées
à « lever » les ménagères . La boucherie qui clôt
la rue Mouffetard restera muette. Les affaires ? « C’est
pas mon rayon ». Le 139 bis ? « Nous on est
au 139 je crois… ». Le 139bis n’existe pas. Quatre électeurs
sympathisants RPR y sont inscrits. La situation rue Saint
Jacques est plus compliquée. Le dernier numéro en vue, le
307, est à deux pas plus loin interrompu par un grand boulevard.
A la boulangerie du coin, on ignore si le 373 existe mais
on sait que le magasin « termine » la rue. Onze
personnes une nouvelle fois virtuellement proches du RPR y
sont répertoriées. Au cinq rue Rabaud, une trentaine d’électeurs
ont été domiciliés fictivement. L’appartement est très tendance
OPAC. On n’accède aux boîtes qu’en ouvrant la porte. Sécurité ?
Au 11 rue Bernard enfin, on frise la provocation. 35 personnes
employées à la mairie de Paris y seraient fictivement domiciliées.
Le siège du Monde est à quelques mètres. La porte est usée.
Le numéro peint à la main. Pourquoi donc accepter d’y être
domicilié et prétendre y voter ?
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