Chroniques
Nomades
a décidé de soutenir et de rendre compte d’un événement culturel
et littéraire majeur : la publication prochaine (début des
réjouissances en 2002) d’un corpus (une biographie, correspondances
et romans inédits) consacré à l’écrivain Henri Calet (1904-1956).
Pourquoi
cet écrivain ? Parce qu’il fait partie de cette famille d’écrivains
qui ont en commun cette particularité de ne pas appartenir à la
littérature dominante. Comme Emmanuel Bove, Georges Hyvernaud, Paul
Gadenne, Raymond Guérin, Arthur Cravan, Luc Dietrich ou Jean Reverzy,
Calet rejoint cette « face cachée » de la littérature
française contemporaine. Une cohorte digne et libre d’outsider
qu’on pourrait comparer aux artistes singuliers de l’art brut. La
plupart d’entre eux ont toujours refusé de se plier aux hypocrisies
et convenances qui régissent le milieu littéraire. Ils ont ciselé
leur œuvre dans la discrétion et le silence, loin des déclamations
bruyantes et des révérences. Un écrivain n’est pas grand ou petit.
Il n’y pas de littérature mineure ou majeure. Il y a tout simplement
des bons écrivains. Henri Calet en fait partie.
Nous
avons aussi choisi Calet pour sa prédilection pour le voyage qui
joue un rôle capital dans son œuvre. Un écrivain voyageur non conformiste,
tendre et ironique, proche de notre sensibilité. « Ce qui
rend les voyages à peu près inutiles, c’est que l’on se déplace
toujours avec soi. » (L’Italie à la paresseuse)
Le
texte quasiment inédit (une seule
publication dans Le Figaro littéraire du 3 septembre 1955) que nous publions sur Chroniques
Nomades est un formidable récit de voyage. Un voyage de dilettante
facétieux, un voyage à la périphérie, où grâce au talent inouï de
l’auteur, l’île de Noirmoutier devient un lieu exotique, presque
inquiétant…
Avec
l’amicale complicité de Jean-Pierre Baril, son biographe, nous publierons
régulièrement sur le site des textes de Calet
pour accompagner et fêter
cette « résurrection littéraire ». Une manière
pour nous de dire notre affection pour cet écrivain rare qui deux
jours avant sa mort écrira dans son agenda ces mots poignants :
« C’est sur la peau de mon cœur
que l’on trouverait des rides. Je suis déjà un peu parti, absent.
Faites comme si je n’étais pas là. Ma voix ne porte plus très loin.
Mourir sans savoir ce qu’est la mort, ni la vie. Il faut se quitter
déjà ? Ne me secouez pas. Je suis plein de larmes. »
Jean-Luc Bitton
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