Avant
de débuter ma rubrique, je souhaiterais rendre un hommage
à une anti-star, un certain Joe Strummer qui a clashé
avec la vie dans sa cinquantième année.
Lundi
23 décembre 2002, milieu de la matinée. Mon ordinateur m’interpelle.
Courrier Web. Deux phrases sans état d’âme. « Strummer
est mort hier. Nos condoléances à sa femme Luce, à sa famille
et ses amis »
C’est
fini. Il n’a pas souhaité avoir un futur après 2002. Une anti-star
notoire disparaît quand tout un chacun veut trouver la célébrité
au travers le poste télé, célèbre. Espace d’un instant.
La
tête pleine de souvenirs, j’écoute l’album « Sandinista ! »,
enregistré par les Clash en 1980. [ Soutien à la révolution
nicaraguayenne de 79 (*)].
Une veille cassette achetée au début des années quatre-vingt
à Londres.
Souvenirs.
Fin des années 70 au début de la décennie suivante. Série
d’escapades transmanches. Ce sont les années punks. Depuis
76, Joe Strummer, Mick Jones et les autres ont mis en route « The
Clash ».
Envoûtement
dès la première seconde lors d’un concert londonien
en 1979 . Rock brutal, épidermique et rudimentaire. C'est
différent. Sensation instantanée. Aucun lien
de parenté avec les « Sex Pistols » même
s’ils étaient génériquement punk. Un autre monde où
il n’était plus question de petits blancs gueulards
aux limites de la xénophobie. C’était un « Combat
rock » fait de musique politique et combattante.
Joe était politiquement provocateur. A des années-lumière
de Sid Vicious qui tira sa dernière révérence avec une overdose
foudroyante l’année même où Magaret Thatcher s’installa dans
le fauteuil de premier ministre britannique pour une longue
décennie de libéralisme de la Répression, de l’Inégalité,
et de l’Injustice..
Il
fallait répondre à la décrépitude d’un establishment
victorien désuet et fourbe qui laissait la société britannique
s’engloutir dans le chômage, la haine raciale, la pauvreté,
le désespoir. Puis ce fut la nécessité impérieuse
de résister au thatchérisme triomphant. Chansons politiques,
mélange de désespoir et de progressisme. Exhortation
à la rébellion.
Il fallait aussi en finir avec le rêve hippie du « peace
and love ». inapte pour le chaos. Place aux rebelles
urbains de la génération « No Futur ». Nihiliste
prémonitoire d’une génération à venir, la « génération
galère ». Sans passé apparent, une génération au
présent inexistant et au futur absent.
Joe
Strummer était de tous les combats contre cette « Dame
de Fer », mère de « Poll Tax »,
maîtresse des « Malouines » et ami d'un dictateur
chilien zélé. De toutes les révoltes contre les inégalités,
l’arbitraire, le racisme. Pour lui les frontières de la planète
ne s’identifiaient aux rives de l’Île des Britanniques.
Elles passaient par le Nicaragua et sa révolution, par la
Jamaïque et son Reggae
Il
y avait chez lui un côté d’incorruptible. Sa notoriété n’avait
en rien perverti son intégrité. Il ne voulait pas être une
célébrité. Être tout simplement « légendaire »
parce que cela « signifie que tout le monde connaît
ce que tu as fait mais que tu es fini, alors que célèbre veut
dire que tout le monde connaît ce que tu as fait, mais que
tu es riche », expliquait-il en octobre 1999. Maintenant,
il serait opportun de devenir une légende.
Il
paraît que « Rock The Casbah » a été
une des chansons les plus diffusées sur les radios pendant
la « Guerre du Golfe I ». Ce sera sûrement
une autre musique pour l’épisode II annoncé de ce racket pétrolier
planétaire .
Il
est mort à l’heure de la renaissance de Mick Jones avec son
groupe rock Libertines, son alter ego guitariste et chanteur
saqué en 1983 des Clash pour déviationnisme musical. Une nouvelle
pirouette. Peut-être la dernière.
L’album
« Sandinista ! » vient de diffuser sa
dernière note. Merci
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