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Wild Wild West

 
Découvert en 1998 avec  “ The Black Light ”, un premier album aux rythmes italiens, castillans et aux senteurs  méxicaines, Calexico groupe d’Arizona, continue ses ballades musicales  progressives et intercultrelles, avec “ Hot Rail ”, album nomade à écouter aussi bien en cadillac qu’aux meilleures heures de farniente.
 
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Wild Wild West
 
Petit matin, gare de Tucson, Arizona : Etat du Sud Ouest américain, ses trois millions d’habitants dont 10 % de “ naturales ” descendants des indiens navajo, apaches, hopi. Arraché aux Mexicains en 1848, l’Arizona est fédéré tardivement à l’Union en 1912. Le 48eme Etat est pacifié au prix de longues luttes contre les Apaches originellement nomades, qui s’opposèrent farouchement aux colons espagnols comme nord-américains.

Sur le quai pas un indien en vue. Mais un soleil de plomb et une poussière brûlante, irritant une gorge déjà sèche. Le climat aride râpe la peau. Quelques touristes s’apprêtent à grimper dans une Cadillac. Le programme ? “ Shooter ” le Cimetière des avions, pour filer vers le Nord sous des cieux tout aussi  photogéniques (mais plus cinématographiques) observer le plateau du Colorado et pourquoi pas, taper la discute avec un clone du cow-boy Marlboro.

Dix “ desperados ” fly-cases et trompettes en bandoulière descendent également, les yeux  rivés vers le Sud et ses longues étendues désertiques qui séparent, avec le Rio Grande le Premier Monde du second. Là bas périrent en 1999, près de quatre cents “ clandestins ” Mexicains venus tenter leur chance au Nord.

Bizarrement leur wagon reste en gare, entouré par un essein d’agents de la migration armés jusqu’aux dents. Vérification faite les fly cases ne contiennent ni armes ni  drogues. Les membres de cette joyeuse compagnie aux allures de “ pistoleros ” sont des ressortissants étasuniens ou disposent d’une “ green card ”. Leurs  passeports indiquent une curieuse  provenance, Calexico, qui ne figure sur aucune carte du coin. Les agents fédéraux écarquillent les yeux à la vue du tampon de la ville : un paradis musical sans complaisance battant pavillon post rock  et ayant pour seul résident ces dix “ Calexicos ”. Questions d’usage. “ Qui êtes vous ? Qu’allez vous faire en ville ? Joueurs de cartes, vendeurs d’alcool frelatée... Vous allez jouer dans le café colombien entre la cinquième et la huitième rue, bon... Des clandestins à bord du wagon ? Non.. ”. “ On va vérifier dans le wagon quand même ”.

Entre temps, resté en retrait on apprend que les deux propriétaires d’origine irlandaise et italienne se prénomment John (batterie) et Joey (guitares). Ils ont accompagné Vic Chesnutt et Lisa Germano et ont sévi dans quelques sections rythmiques. A quelques pas des deux comparses, l’homme à l’harmonica qui empêche les fédéraux de tripatouiller les boutons du mini-studio c’est l’ingé-son, Craig Schumacher. Les deux mariachis qui tentent d’expliquer que la bouteille qu’ils ont en main, est remplie de Tequila et non de Peyote, ce sont Ruben Moreno et Martin Wenk, deux “ chicanos ” amoureux de Led Zep et de Janis Joplin. La fille un peu en retrait qui se moquent des agents, c’est Marianne une française qui vient chanter avec eux en fin d’après midi. 

A l’intérieur, pas âme qui vive mais un délicieux capharnaüm. De vieilles formules jaunies par le temps croupissent sous des amplis. A la vue de ce qui ressemble à un labo musical clandestin les fédéraux sont fous de rage. L’un : “ C’est quoi ce machin ? ”. Tim Gallagher “ Un pedal Steel m’sieur, ça se joue assis ”. L’autre : “ Et ce truc à piston ? ”. Rob Mazurek : “ Un cornet ”. L’autre : “Un quoi... ? ”. Un autre fédéral : “ Allez laisse tomber y a rien d’intéressant ”.

Affaire classée. Le groupe descend maintenant les instruments direction le dit café colombien, donc quelque part entre la cinquième et la huitième avenue du “ Hot Tucson ”. Là, le patron les accueille à grands renforts de “ Olé, que tal ? ”. Sympa. Les mariachis montés en cours de route sur l’album “ the black light ” ont passé la “ frontera ” et font les balances. Le reste du groupe décide de débuter le concert par une partie d’ “ Hot Rail ”, leur dernier album. Le set commence par un long plan séquence. Des rythmes castillans ou italiens font ensuite les liens entre des chansons minimalistes ou très orchestrées, lentes ou dynamiques. Les plans oscillent entre le panoramique et la macro La balance des structures, des couleurs et de l’espace s’équilibre lentement. L’alchimie se fait, mais sans précipitation. Calexico alterne ensuite plongée et contre plongée pour dégringoler avec un “ Fade ”  très free-jazz. La voix cristallise dès lors l’espace. Intuitive, elle pose des images sur les rêves, les sons et les saveurs qui l’habitent. Silence. Le set s’achève sur un long souffle. Celui des cheminots qui à chaque rail posé, rendaient la conquête de l’Ouest de plus en plus plausible. Celui du vent de Tucson qui a toujours les yeux rivés sur de nouveaux horizons.

Dehors le soleil n’a pas molli. Il semble s’être étendu. Le groupe des majorettes du troisième âge de Tucson défilent en rang d’oignons répétant la célébration de la fête nationale. En arrière plan, là-haut dans les montagnes, un Indien est interpellé en train d’envoyer des signaux de fumée...
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