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(Photo
D.R.)
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Malcom
Lowry
est l'auteur de "Au-dessous du Volcan", l'un
des plus grands roman de ce siècle, mais aussi d'Ultramarine,
de Lunar Caustic, de Sombre comme la tombe où repose
mon ami, de recueils de nouvelles : Ecoute notre voix, ô
Seigneur..., En route vers l'île de Gabriola et de poèmes
qui font de lui un des écrivains représentatifs
d'une époque à la recherche d'un improbable
salut. Né et mort en Angleterre, il a passé
la plus grande partie de sa vie aux Etats-Unis et au Canada,
en dehors de voyages en Norvège et en Espagne, de séjours
au Mexique (où se passe l'action d'Au-dessous du Volcan),
en talie et en France. (Maurice Nadeau) Malcom Lowry repose
en Angleterre, son pays natal, dans un cimetière du
Sussex. Enfin, j'espère qu'il repose, après
avoir tant navigué, tant couru, avoir connu la Chine
et le Mexique; après que l'angoisse, l'alcool et leur
cortège de mauvais fantômes, leur théorie
de vampires, l'eurent tant fatigué, tant crevé,
tant persécuté. La mort sournoise et le désespoir
n'ont cessé de lui adresser des signes, d'affreux sourires
de connivence, de lui faire une cour assidue, obsédante,
jusqu'à ce que sa vie prit fin. Il laissait divers
manuscrits, notamment des poèmes, dont un choix parut
en 1962, à San Francisco. Ce sont des poèmes
d'océans, de villes lointaines, d'amours fragiles,
d'amertume, d'aventures rongées par la dérision,
de voyages qui se terminent en naufrage. Ils relatent l'histoire
d'un pauvre roi déchu, pour qui le monde est une prison.
Les vautours, la solitudes, la neige, l'angoisse, l'aube,
la détresse, les cargos, la vie, les loups, la mort,
les mouettes, dansent un étrange ballet, s'étreignent,
forment une gerbe d'écume, de fleurs vénéneuses,
de mots flamboyants, dans laquelle transparaît le visage
tourmenté de Saint Malcom.
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François Bott -
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Prière
pour les ivrognes |
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Dieu,
donne boire à ces ivrognes
Qui se réveillent à l'aurore
Sur les genoux de Belzébuth, en plein délire,
Les membres recrus de fatigue
A l'instant où par la fenêtre ils aperçoivent
Encore une fois, le jour qui s'accroît
Terrible comme un pont coupé
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Trente-cinq
mescals à Cuantla |
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Le
pire de tout, c'est ce tic-tac,
Vous savez, qu'on entend en bateau, dans le train,
Et qu'on entend partout, car il est le destin;
Tic-tac de la mort vraie, non pas seulement du temps;
Termite rongeant les lambris pourris du monde
Et pour toi c'est la mort, même si tu connais
Le tic-tac silencieux du coeur qui va faillir
Dans sa course contre la montre, battement
Qu'on entend de partout, qui toujours ralentit
Mais qui n'est pourtant pas le tic-tac de la mort vraie,
Seulement celui du temps, seulement le carillon
Qui sonne dans le coeur quand une peur soudaine
Fait grelotter le corps comme un réveil patraque
Le réfrigérateur ronronne dans le bar
Tandis que la gare émaciée oppose
Son bourdonnement aux bruits de la rue
Que dirai-je sans injustice
De ce lieutenant aux épaules larges - une main
Derrière le dos, salie de sang, tient un cigare
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Sinon qu'il bouche tout un pan
De ce soleil intermittent
Sous lequel luttent contre la tempête
Des bribes de liberté, et où la foudre bleue
Fait un bruit de pelle à charbon ?
Le tonnerre roue de coups les montagnes ogivales;
Mais pourquoi faut-il que tu entendes cette tempête,
L'entendes sans la reconnaître. |
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