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Petite
Bibliothèque Nomade |
Quelques
notes sur le pays Chiapas |
En
guise de cadeau de Noël, voici un texte retrouvé
au fond de mon ordinateur, écrit lors de mon bref passage
à l'université de Montréal. Il permettra
une meilleure compréhension de ce qui se passe aujourd'hui
au Chiapas.
Dans
les années 50, les agences internationales de développement
soucieuses de l'explosion démographique dans les pays
du tiers-monde mettent au point un programme de développement
appelé "révolution verte". Pour expérimenter
ce modèle de production agricole, l'Inde et le Mexique
seront choisis comme laboratoires. Issue de la théorie
de la modernisation, dans le contexte de la guerre froide,
la révolution verte se veut un modèle "miracle"
pour endiguer la faim dans le monde. Enthousiastes à
l'idée de passer du tiers-monde au "premier monde",
les gouvernements des pays défavorisés suivront
à la lettre les directives de cette modernisation agricole
imposée par le cartel des pays riches. Nous verrons
plus tard, quelles seront pour le Mexique, les conséquences
et les répercussions, jusqu'à la dépression
d'aujourdhui, de cette première tentative de modernisation.
Il nous faut tout d'abord remonter dans le temps afin de mieux
saisir la situation de crise actuelle.
Chapitre
1 : L' histoire agricole mexicaine est jalonnée
d' injustices [../..]
Chapitre 2 : C'est par le biais de cette crise environnementale
[../..]
Chapitre 3 : Avec le texte de James Petras, nous rentrons
dans les rouages [../..]
Chapitre 4 : Le tableau semblerait bien sombre, si
du Mexique justement [../..]
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Chapitre
1 |
L'
histoire agricole mexicaine est jalonnée d' injustices
d'où découlera une longue tradition de réformes
agraires. Dés 1911, les masses paysannes dans l'Etat
de Morélo se mobilisent contre l'usurpation de leurs
terres par quelques familles de puissants cultivateurs. Sous
la bannière d'Emiliano Zapata, les paysans autochtones
de Morélos prendront les armes et revendiqueront la
première réforme agraire: le plan d'Ayala. Ce
document rédigé par Zapata exige la récupération
des terres usurpées et le droit aux "campesinos" de
posséder collectivement la terre sous forme de terrains
inaliénables et imprescriptibles : les "ejidos".
Il faudra attendre la constitution de 1917 et son article
27 pour que ce projet en faveur d' une propriété
collective trouve un écho. Mais l'article 27 ne sera
qu'un compromis étant donné les ambiguïtés
du texte de la réforme au sujet de la propriété
individuelle privée. Malgré tout, le président
Lazaro Cardenas, entre 1936 et 1940, s'inspirera de cette
loi en distribuant des millions d'hectares aux communautés
paysannes dépossédées à travers
tout le pays.
Cette initiative généreuse n'aura malheureusement
pas de suite, les gouvernements qui succéderont à
Cardenas renforceront les privilèges de l'oligarchie
rurale. C'est dans ce contexte favorable aux gros propriétaires
que sera adopté le modèle de la révolution
verte. Derrière le succès de ce système
importé des Etats-Unis, (la croissance agricole entre
1940 et 1965 augmentera de 6% par an ), se cachent des effets
pervers qui donneront naissance non seulement à une
crise agricole, mais également à une crise écologique.
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Chapitre
2
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C'est
par le biais de cette crise environnementale que Victor Manuel
Toledo au fil de son texte développera son argumentation.
Dans son introduction Toledo tient la liste des effets négatifs
qui ont accompagné la modernisation du Mexique comme
la progressive désintégration sociale et économique
du monde paysan et autochtone, sans oublier la dégradation
de leur écosystéme. Ajouté à cela
des conséquences écologiques résultant
d'une industrialisation et urbanisation anarchique. Toledo
met l'accent sur le fait de ne pas dissocier l'analyse sociale
de celle de l'écologie, afin que cette dernière
ne soit pas réduite à ses préoccupations
habituelles mais soit considérée dans une perspective
plus globale à l'intérieur d'un système
en interaction. L'auteur soulève également un
point important de la Constitution de 1917 qui tient pour
patrimoine public les ressources naturelles renouvelables.
En effet, pour les autochtones la terre n'est pas un bien
à acquérir, mais un bien social et collectif
attribué à chacun, dont on doit respecter le
caractère sacré. Malgré tout, ce patrimoine
naturel , observe Toledo, ne dispose d'aucun système
cohérent et efficace pour son exploitation et sa production.
Dans son premier chapitre, l'auteur dénonce le mouvement
de modernisation, basé sur la loi du profit à
court terme, importé des pays capitalistes industriels
avec ses techniques inadaptées à l'environnement
écologiste, social et culturel du Mexique. L'élevage
extensif des bovins est pris comme exemple de ces inadéquations.
Le bétail est dévoreur d'espace, près
de la moitié du territoire national est consacré
à l'élevage. Le sur-pâturage rend la terre
incultivable et provoque l'érosion des sols. Pour satisfaire
le besoin croissant en pâturages, on réalise
des déboisements industriels dans les forêts
tropicales en détruisant en même temps la richesse
de leur écosystème. Comme le note, Toledo, cet
engrenage dramatique a commencé avec l'adoption d'un
système de production agricole importé des États-Unis
dont nous avons parlé a paravant: la révolution
verte. Ce modèle agraire américain a pour but
d'améliorer la productivité par tous les moyens
d'une agriculture industrielle (génétique, engrais
et pesticides) sans se soucier des effets négatifs
à long terme sur l'écosystème et ses
habitants. Dans les pays industrialisés, on connaît
aujourd'hui les limites de cette agriculture intensive et
ses retombées néfastes pour l'écologie.
D'autre part, il est absurde voire nuisible d'appliquer ce
modèle aux pays en voie de développement sans
tenir compte de la réalité écologique,
sociale et culturelle de ces pays. Comme l'observe Toledo,
l'inadéquation de ce système au Mexique est
totale.
Derrière les chiffres triomphateurs du "miracle mexicain"
se cache une faillite sociale et écologique. Relevons
maintenant quelques incohérences de cette première
modernisation. La révolution verte est basée
sur une monoculture extensive qui nécessite des grandes
surfaces planes et des pluies régulières, alors
que le Mexique a une tradition ancestrale de polyculture où
45% de la population agricole vit dans des régions
au relief accidenté et aux pluies aléatoires.
Par ces caractéristiques mêmes, ce système
est en fait uniquement applicable aux gros propriétaires
mexicains. Ces derniers vont s'approprier l'aide des fonds
publics__ º et agrandir ainsi leurs "fincas", les domaines
agricoles qui vont devenir des "latifundios" au dessus des
limites légales (150 hectares) déguisés
par des fractionnements familiaux. On favorise également
la culture du blé au détriment de celles du
maïs et du haricot : les cultures traditionnelles par
excellence du Mexique. De cause à effet, les masses
paysannes vont s'appauvrir tandis que les caciques et autres
privilégiés ne cesseront de s'enrichir. L'Inégalité
sociale et ses violences se renforceront. En 1960, on constate
le caractère hautement éphémère
de la révolution verte : 83% des agriculteurs mexicains
de peuvent maintenir leurs familles qu'à un niveau
de subsistance, ou même d'infrasubsistance.
Aujourd'hui, Toledo cite pour responsable ce système
de modernisation dans la carence de spécialistes mexicains
en polyculture, agriculture de terrasse ou en milieu tropical.
Responsable également, des effets écologiques
de l'implantation forcée du modèle dans des
régions inappropriées.
L'exploitation des boisés reproduit une fois de plus
le schéma de production importée : on exploite
qu'une espèce ou deux tout en délaissant les
autres. Nous avons vu que l'expansion de l'agriculture et
de l'élevage était la principale cause de la
destruction des zones tropicales, à ce problème
écologique majeur, s'ajoute les pollutions provoquées
par le phénomène de centralisation industrielle
et urbaine. La concentration urbaine s'est effectivement accélérée
dans les années 60, quand la modernisation a provoqué
la ruine des paysans (ejidatarios) qui, quittant leurs terres
sont partis en ville à la recherche d'un emploi. Les
plus "chanceux" trouveront un travail pénible dans
une usine américaine, les autres iront rejoindre le
flot grossissant des sans-emploi en périphérie
des villes. La concentration industrielle est également
à l'origine de graves pollutions sur tous les écosystèmes
( aquatiques, forestiers, agricoles), sans omettre la pollution
alarmante de l'air en ville.
L'héritage est lourd, les mauvaises habitudes sont
prises, tous les secteurs agro-alimentaires sont touchés.
L'appareil de production se trouve orienté, écrit
Toledo, vers la satisfaction des demandes de l'industrie et
de l'exportation et non vers celle des besoins alimentaires
de la population.
Malgré l'importante richesse de ces ressources naturelles
et à cause de leur exploitation irrationnelle au bénéfice
des pays extérieurs, le Mexique est désormais
obligé pour nourrir sa population croissante d'importer
d'énormes quantités d'aliments. Dans la dernière
partie de son texte, Toledo nous démontre qu'il existe
une autre alternative à un modèle capitaliste
pur et dur, source d'injustices et d'inégalités.
Une alternative pertinente fondée sur l'immense potentiel
alimentaire de l'écosystème mexicain et son
exploitation rationnelle en respectant les traditions et les
lois naturelles. Ce potentiel alimentaire se retrouve le long
des côtes mexicaines avec ses 600 espèces de
poissons; dans ses déserts, ses maquis et ses forêts
tropicales où poussent à l'état sauvage
des centaines d'espèces végétales dont
certaines à valeur hautement nutritive. Au final, l'auteur
propose un début de réponse en invitant à
une action politique, écologique de concert avec un
projet national. Il souligne l'urgence de cette politique
en constatant la dégradation prononcée des ressources
naturelles opposée à l'expansion démographique.
Toledo demande de à l'Etat de régler l'usage
des ressources naturelles en adoptant de nouvelles mesures
législatives et une stratégie innovatrice en
matière de science et de technologie agricole. Le tout
basé sur l'écologie et en harmonie avec les
cultures traditionnelles.
Sur le point concernant l'intervention de l'Etat, on peut
rester sceptique quant à son efficacité, connaissant
la mauvaise foi et la corruption des successifs gouvernements
mexicains. Cette demande n'est pas utopiste si l'on considère
qu'il y a un nouvel espace politique. En relatant le commencement
de la lutte des habitants de Vera Cruz contre l'inutilité
d'une centrale nucléaire, Toledo à la fin de
sont article ouvre une porte à l'espoir de ce nouvel
espace politique dont l'écologie devra faire partie.
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Chapitre
3 |
Avec
le texte de James Petras, nous rentrons dans les rouages pernicieux
de l'économie néo-libérale capitaliste
appliquée une fois encore aux pays en voie de développement
d'Amérique Latine. Cette autre modernisation imposée
par les pays riches n'a fait que renforcer et augmenter brutalement
des inégalités sociales déjà présentes.
Au Mexique l'adoption de ce modèle néo-libéral
concorde avec l'arrivée au pouvoir de M. Miguel De
la Madrid en 1982. Ce dernier orchestre une vaste campagne
de privatisation. L'Etat est littéralement dépouillé
de la plupart de ses entreprises publiques. Dans cette vente
sauvage M. De la Madrid n'a pas oublié ses amis, qui
se partagent la plus grosse part du gâteau national.
Dix grands groupes financiers vont émerger de cette
privatisation frauduleuse et contrôler 71% des actions
cotées à la Bourse de Mexico. Entre 1988 et
1994, le président Carlos Salinas de Gortari poursuivra
cette politique néo-libérale. La place boursière
de Mexico sera submergée par les capitaux étrangers
attirés par une spéculation facile. Pas un seul
dollar de cette manne prodigieuse ne sera investit dans les
infrastructures locales ou à la création d'emplois.
De l'autre côté de la barrière, comme
le note Petras, les décideurs occidentaux se félicitent
de ce "redressement économique". En mai 1994, l'Organisation
de coopération et de développement économiques
(OCDE) décidera, à titre de récompense
de faire du Mexique le vingt-cinquième membre du groupe
des nations les pus riches du monde. Sept mois plus tard,
ce sera la faillite financière... Sous cet éclairage
historique, le texte de James Petras rédigé
en janvier 1994, prend des allures de prophéties. A
travers son article nous pouvons suivre les mécanismes
et les effets délétères de cette néo-libéralisation
de l'économie. Tout débute, comme nous l'avons
observé, par une privatis__ áation des entreprises
publiques et une arrivée massive de capitaux étrangers.
Ces investisseurs extérieurs se réjouissent
de maximiser leurs profits grâce aux taux d'intérêts
très élevés : jusqu'à 19% en Amérique
Latine contre 2% en Europe et aux Etats Unis. Après
avoir enregistré leurs bénéfices, au
moindre frémissement du marché, ces investisseurs
émigrent à nouveau vers d'autres places boursières
prometteuses. Un pays d'accueil comme le Mexique se retrouvera
ainsi orphelin et déficitaire de plusieurs milliards
de dollar. Ce yo-yo financier spéculatif aura pour
effet de provoquer des licenciements dans les entreprises.
Quant aux privatisations, elles ont un triple effet négatif
sur le pays concerné : accroissement du chômage,
détérioration de la balance des paiements et
perte de l'indépendance nationale. Elles ont également
favorisé le partage inégal du patrimoine public
comme au Mexique où sur cent millions de personnes,
10% possèdent 70% du revenu national tandis que les
90% autres se partagent le reste. Cette spéculation
financière n'aura jamais autant prospéré
que durant ces dernières décennies jusqu'à
son apogée d'aujourdhui.
Le total quotidien des opérations financières
mondiales est estimé à 1500 milliards de dollars
dont 95% relèvent de la spéculation pure : rien
n'est acheté, vendu ou produit; seul l'argent change
de mains. Les gouvernements du tiers-monde complices se soumettent
au diktat de cette mondialisation économique issue
des doctrines néo-libérales. Au Mexique, les
effets de cette politique sont désastreux, une grande
partie de la population se retrouve marginalisée, l'écart
entre les riches et les pauvres ne cessent de s'accroître.
De surcroît, les bailleurs de fonds internationaux demandent
des coupures drastiques dans les dépenses publiques
(éducation, santé, logement et aide sociale),
de libérer les prix et de geler les salaires.
Le nèo-libéralisme a ainsi préparé
le terrain pour nos investisseurs étrangers qui désirent
implanter leurs centres de production dans des pays où
ils peuvent bénéficier d'une importante main-d'oeuvre
à bon marché et malléable, faute de syndicats
puissants. Si ce n'est pas suffisant, les gouvernants des
pays d'accueil prendront des mesures budgétaires en
faveur des investisseurs (avantages fiscaux, participation
aux coûts, etc...) tandis que les crédits affectés
à la lutte contre la pauvreté se raréfient.
La pieuvre néo-libérale, si je puis m'exprimer
ainsi, ne se contente pas seulement des ressources humaines
mais déploie également ses tentacules sur l'environnement
dont elle capte les ressources une à une : mines, pétrole,
pêches, forêts, agriculture. Et comme l'a remarqué
Toledo, cette mainmise sur les ressources naturelles s'accompagne
de dégâts écologiques majeurs, dus à
une exploitation intensive et irrationnelle fondée
sur la loi du profit à court terme. James Petras conclut
avec justesse, en remarquant que cet afflux de capitaux étrangers,
dans lequel certains voudraient voir un indice de développement,
n'est en fait qu'une opération spéculative opportuniste
qui ne fera qu'aggraver la pauvreté existante et y
puisera même ses forces jusqu'à laisser le pays
hôte exsangue.
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Chapitre
4 |
Le
tableau semblerait bien sombre, si du Mexique justement, n'était
venu un peu d'espoir, avec la remise en question radicale
du néo-libéralisme triomphant, par ceux qui
ont toujours été les plus durement touchés
par ces injustices : les populations paysannes et indiennes.
Les insurgés autochtones du Chiapas héritiers
d'Emiliano Zapata, choisissent le 1er janvier 1994, date symbolique
de la mise en vigueur du traité de l'Alena (Accord
de libre-échange nord-américain), pour pousser
leurs cris de révolte: Basta ! (Assez !). Que c'était-il
passé ? Nous avons vu que sous la présidence
de Carlos Salinas de Gortari, le processus de la modernisation
néo-libérale s'est emballé, jusqu'à
l'inexcusable décision d'abolir le fameux article 27
qui définissait l'inaliénabilité des
terres Amérindiennes.
Cette nouvelle épreuve venant s'ajouter à plusieurs
siècles d'iniquités fera prendre les armes et
la parole à ceux que la modernisation avait toujours
oubliés et méprisés. Leur cri de révolte
trouvera un écho universel jusqu'à l'anthropologue
Marie-José Nadal qui consacrera un livre à l'insurection
indienne intitulé : A l'ombre de Zapata, Vivre et mourir
dans le Chiapas.
Dans son introduction, l'auteure retrace chronologiquement
l'histoire du conflit et énumère les premières
revendications de l'Armée zapatiste: élection
libre, démission du gouvernement, le droit des femmes
et la dénonciation des conditions de vie dans l'Etat
du Chiapas. Les deux premiers chapitres sont consacrés
au contexte social, économique et politique dans lequel
la rébellion a éclaté. Dans les chapitres
suivants, l'auteure met l'accent sur des points essentiels
: la question agraire, vitale pour les autochtones du Chiapas
et la revendication à une indianité ouverte
sur le monde. En effet, le problème de la pression
sur la terre par l'élevage intensif dont nous avons
parlé auparavant, se fait cruellement ressentir au
Chiapas plus que partout ailleurs. Au fil des années,
l'espace agricole Amérindien s'est rétrécit
au profit de quelques familles d'éleveurs chiapanèques
qui pour maintenir leur système oligarchique n'hésiteront
pas à faire régner la terreur par la violence
et la corruption. La libéralisation économique
a également favorisé le pillage et l'exportation
des nombreuses richesse naturelles du Chiapas. La population
et l'infrastructure locale ne touchera aucun bénéfice
de ces opérations commerciales, sinon des retombées
néfastes pour l'environnement. Parallèlement,
sous le prétexte de protéger la forêt,
l'Etat mexicain interdit aux paysans la coupe des arbres,
les privant ainsi de leur seul combustible de chauffage. Dès
lors, pour citer Noam Chomsky, nous découvrons "un
monde complètement surréel". Un monde où
l'injustice n'existe pas, un monde où la devise zapatiste,
à l'élégante générosité
: "Tout pour tous, Rien pour nous." n'a pas sa place. Le livre
de Marie-José Nadal rejoint les préoccupations
écologiques de Victor Manuel Toledo et celles de James
Petras sur la mondialisation de l'économie au détriment
du tiers-monde mais également en la défaveur
des pays occidentaux, accroissant le nombre d'exclus dans
le monde entier. De fait, par leur contenu, les revendications
zapatistes répondent d'une façon frappante aux
interrogations de Petras et Toledo. Concernant la question
agraire et environnementale, voici quelques points des demandes
des insurgés : "Sera sujette à affectation agraire
révolutionnaire toute étendue de terrain excédant
100 hectares en mauvais état ou 50 hectares en bon
état. Ne ferons pas l'objet d'affectation agraire les
terres communales, ejidos ou terrain appartenant aux coopératives
populaires. Les terres affectées devront être
travaillées en collectivité. Les groupes bénéficiant
de cette Loi agraire devront se consacrer de préférence
à la production collective des aliments nécessaires
au peuple mexicain : maïs, haricots, etc....
Les excédents de production pourront être exportés
vers d'autres pays s'il n'y a pas de demande nationale pour
le produit concerné. Les grandes entreprises agricoles
seront expropriées et passeront aux mains du peuple
mexicain. Les zones de jungle vierge et les forêts seront
préservées, et les campagnes de reboisage seront
menées. Les sources, rivières, lacs et mers
sont propriétés collectives du peuple mexicain
en les préservant de la pollution et en punissant leur
mauvaise utilisation. La réforme saliniste de l'article
27 doit être annulée. Il est primordial que toutes
les communes du Chiapas disposent des bienfaits de l'énergie
électrique et qu'un pourcentage des revenus de la commercialisation
du pétrole du Chiapas soit attribué à
des travaux d'infrastructure industrielle, agricole, commerciale
et sociale pour le bénéfice de tous les habitants
du Chiapas. Nouveau pacte entre les membres de la fédération
mettant un terme au centralisme et reconnaissant l'autonomie
des communautés indiennes."
Les zapatistes n'oublient pas non plus de rejeter le néo-libéralisme
et ses modernisations importées : "Révision
du Traité de libre commerce signé avec le Canada
et les Etats-Unis puisqu'en l'état il ne prend pas
en considération les populations indigènes et
les condamne à mort pour absence de toute qualification
professionnelle. En tant que peuple indigène, qu'on
nous laisse nous organiser et nous gouverner de façon
autonome parce que nous ne voulons plus être soumis
à la volonté des puissants du pays ou de l'étranger.
Liberté ! Justice! Démocratie !"
Le cri de révolte de ce mouvement de révolte
Amérindien, par sa défiance aux puissants de
ce monde, se devait de trouver une résonnance universelle,
illustrée par leur dernière déclaration
d'août 1996, proposant la création d'un réseau
intercontinentall de résistance au néo-libéralisme.
Nous aurons compris que le Mexique a été trop
longtemps considéré par une communauté
internationale complaisante comme un pays modèle, que
les fondations de son développement étaient
construites sur du sable et que ce soi-disant " miracle économique"
qui a rejailli sur les riches, a dévasté la
majorité défavorisée et son environnement.
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Sources
bibliographiques |
AVILES,
James
1996 : "Main basse sur le Mexique", Le Monde diplomatique,
août, no 509, pp. 4-5
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CHOMSKY,
Noam
1996 : Un monde complètement surréel,
Montréal, Editions Edam, 46p.
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DUMONT,
René et Marie-France MOTTIN
1981 : "Mystification et imposture de la révolution
verte (1940-1966)", dans Dumont, R., et M-F Mottin,
Le mal-développement en Amérique Latine
: Mexique,Colombie, Brésil, Paris, Editions du
Seuil, pp 47-52.
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GOLDSMITH,
Edward
1996 : "Le pourvoir des transnationales", Le Monde diplomatique,
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MONOD,
Aurore (dir.)
1994 : Feu Maya. Le soulèvement au Chiapas, Paris,
Editions Ethnies 16-17, 318 p__ .
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NADAL,
Marie-José
1994 : A l'ombre de Zapata. Vivre et mourir au Chiapas,
Montréal, Editions de la Pleine Lune, 272 p.
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PETRAS,
James
1994 : "Afflux de capitaux étrangers, appauvrissement
des citoyens", Le Monde diplomatique, janvier, pp.8-9
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SOUS-COMMANDANT
MARCOS
1995 : Ya basta ! Les insurgés zapatistes racontent
un an de révolte au Chiapas, Paris, Editions
Dagorno, 480p.
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TOLEDO,
Victor Manuel
1989 : "Mexique : la crise écologique" dans Critiques
socialistes, no 5, pp.119-136 |
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