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Un après-midi chez Bruce Chatwin
par Jean-Luc Bitton
 

Le 10 septembre 2001, un jour avant l’apocalypse new-yorkaise , j’avais rendez-vous avec Elizabeth Chatwin, l’épouse de Bruce Chatwin, le célèbre écrivain voyageur mort des suites du sida en 1989. J’ai toujours été un fervent admirateur de Chatwin dont l’œuvre et la personnalité m’avaient immédiatement séduit. Il fait partie de ces personnes dont la disparition m’a touché comme celle d’un ami proche. Trouver la maison de Chatwin dans la campagne anglaise est déjà en soi un jeu de piste. En venant de Londres, après une heure de route, on se retrouve dans un paysage verdoyant et vallonné – « un tombeau vert » disait-il de l’Angleterre  -  puis un chemin qui s’enfonce dans la forêt avec au bout la maison qui surplombe des prairies en pente douce. Au loin, les moutons d’Elizabeth Chatwin qui pâturent paisiblement dans cette image d’Epinal britannique. Dans l’entrée, une carte ancienne de la Patagonie accueille le visiteur. Plus tard, Elizabeth avec une extrême gentillesse fera une visite guidée et commentée de la maison. Elle répondra en français avec patience à mes nombreuses questions. Je la remercie ici pour son hospitalité et pour cet après-midi qu’elle m’a accordé. L’intégralité de notre entretien sera publié dans la revue littéraire « Les Episodes », ainsi que des lettres inédites de Bruce Chatwin envoyées à Elizabeth lors de ses voyages.

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La chaise de Carpentras

Lors d’un voyage dans le sud de la France, Bruce Chatwin voit cette chaise provençale dans un musée de Carpentras. Quelques jours après, il tombe par hasard sur le même modèle de chaise dans une brocante de la région. Malgré son piteux état, il achète cette chaise. Pendant qu’il écrit En Patagonie, il passe ses pauses à restaurer la chaise, grattant la peinture, persuadé que dessous se trouve la couleur originelle. Effectivement, peu à peu, au fil des strates de peinture enlevée, la couleur d’origine apparaît, un bleu vert pastel… Pour finir la restauration, il faut trouver la paille de riz avec laquelle a été tressé le siège. Un jour à Paris, dans le Marais, Chatwin entre dans une boutique de rempaillage et demande à la vieille femme qui tient ce commerce si elle a de la paille de riz pour cette chaise. La vieille monte sur un escabeau au fond de la boutique et attrape la dernière paille de riz qui lui reste. Ainsi Chatwin peut achever la restauration de la chaise. Observez la jolie forme traditionnelle en X du siège et sa finesse. Bruce Chatwin le nomade qui ne tenait pas en place était passionné par les chaises…

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La « boîte de Dieu »

De ses voyages, Bruce Chatwin ramenait des matériaux avec lesquels ils réalisaient des assemblages. Il les a tous détruits hormis celui-ci. Au dos est écrit en lettres blanches faites au pochoir GOD BOX. On remarquera les initiales de Chatwin écrites également au pochoir sur la vitre amovible. A l’intérieur de cette boîte se trouvent des objets aux propriétés magiques disposés sur un fond de papier peint : un tympan de lion, un gecko desséché, une plume de pintade, un organe interne non identifié et deux ergots d’oiseau enveloppés dans un tissu. On aperçoit derrière la boîte d’autres objets dont une image religieuse et un dessin architectural à la forme d’un coquillage.

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Le salon

Ce salon est la plus grande pièce de la maison de Chatwin. La lumière y entre à flots par les grandes baies vitrées. Elizabeth Chatwin est obligée de tirer les rideaux écrus pour éviter que le soleil ne vienne altérer les couleurs des tissus. Le bleu, la couleur fétiche de Chatwin, domine dans la pièce. Au-dessus de la cheminée est accroché un rectangle de tissus péruvien d’époque précolombienne qui fait penser à un tableau de Rodchenko. A gauche du canapé en toile à matelas, on peut voir une chaise en toile et en cuir de l’armée française du 18 ème siècle. Au premier plan, sur la droite, une amphore achetée au Portugal, un cadeau de Bruce à Elizabeth. Cette pièce reflète bien le goût de Chatwin pour les choses simples et épurées et les matières naturelles comme la terre et le bois. Nous sommes au cœur de l’univers « chatwinesque ».

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Le bureau

Bruce Chatwin écrivait partout dans la maison. Seule la cuisine lui était interdite, le domaine réservé d’Elizabeth. Il passait beaucoup de temps dans cette pièce dont la lumière est tamisée par des stores vénitiens en bois blanc. On voit sur le bureau le dos de la « boîte de Dieu » et ce curieux dessin d’architecte en forme de coquille Saint-Jacques.

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Cinquante secondes chez Bruce Chatwin
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http://www.emmanuel-bove.net/videos/clipmpg.mpg

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